« Un Kodak jetable puis une webcam pour MSN et c’était déjà trop tard. A 8 ans la course aux images débutait sans plus jamais s’arrêter. »

Regarder derrière une dernière fois avant d’entrer dans un lieu.

Un Kodak jetable puis une webcam pour MSN et c’était déjà trop tard. A 8 ans la course aux images débutait sans plus jamais s’arrêter. Des scènes avec les amis, des séries trop ambitieuses avec le voisin et son petit frère à l’invention d’histoires et d’univers entiers le temps de week-ends.

Dans la campagne les activités artistiques c’est parfois bafoué, pour les gens étranges ou extravertis. Rien ne prônait l’initiative individuelle et le moule à gâteau ne semblait n’avoir jamais été aussi dessiné.

Puis le lycée. Enfin l’option arts plastiques était portée par un professeur dévoué et exigeant qui n’acceptait pas les demi-efforts et attendait sans cesse que nous questionnions nos idées. Ça y est, pour la première fois on ne me disait pas que j’allais finir au pôle emploi avec mon Bac L et mon option art.

Cet homme a cru en moi et a motivé mes choix pour me lancer dans le monde de l’Art. Le lycée se termine.

Directement j’ai été admis à la Villa Arson (Nice). Cette école m’a ouvert, appris et dispensé un enseignement artistique riche et contemporain. Ce lieu m’a permis d’acquérir une maturité de travail et une rigueur que je continue d’attiser tous les jours. Je suis entré jeune et aujourd’hui j’ai encore du mal à réaliser à quel point ce lieu m’a transformé.

J’ai la chance de voir, découvrir, rencontrer et dialoguer avec des acteurs de l’art, des artistes et des étudiants d’horizons différents qui m’ont permis de me construire artistiquement.

Les voyages que j’ai eu la chance de réaliser ont constitué ma culture et mon identité à travers les divers pays traversés, les marches et les errances.

Le parcours artistique que j’ai entrepris continue, porté par mes motivations et mes valeurs, dans tout ce que je cherche d’un enseignement, d’une communauté, du faire ensemble dans l’engagement collectif que représente un film.

Dernièrement ça m’a époustouflé.

Un jeunesse française, édition d’enquête et de photographies de Sébastien Deslandes et Hervé Lequeux. Je la découvre par hasard en dernier exemplaire au Musée du jeu de Paume, juste avant de sortir d’une mauvaise exposition.

Dans la continuité de « You get me ? » de Matthab Hussain, qui revendique une identité pakistanaise forte à Londres, il est plutôt question ici des jeunes français des quartiers dans des portraits intimes d’une rareté extrême.

On parle de culture, d’identité.

“Parfois je ne me sens pas Français. Surtout parceque d’autres me le font ressentir. C’est aussi de l’ordre de la provocation, mais en tout cas je ne me sens pas du tout Algérien. Cela me fait rire les petits caïds qui crient “je suis rebeu, je suis rebeu”. Ils ne ressemblent à rien ou peu au bled. Alors du coup, ils ne se sentent rien.” – Hamza 24 ans

The Blaze

Chaque clip du duo français The Blaze est à chaque fois une vague qui renverse. Mais ça, c’était avant de reprendre une putain de claque avec « Territory ».

La mer, on ne regarde pas d’où on est parti mais on se dirige vers d’où on vient, dans l’essence de soi, de ses souvenirs d’enfance à travers des pulsions de vie forte.

Portrait d’une vie familiale, du poids de la religion et d’un détachement puis arrive ce plan séquence sur le toit qui domine Alger à la lueur de la nuit tombante.

Dali traverse l’écran de manière latérale et se laisse porter par une vivacité entrainante sur des pulsions musicales extrêmes.

L’amour de ses racines, le bien être ensemble dans une déambulation primitive, vivante, saisissante.

La couleur changeante des plans, à l’image des facettes d’un pays changeant à travers les âges jusqu’à cette course libre sur la plage ouverte sur la mer dans la beauté des choses simples.

Le tout sublimé par Benoit Soler et l’incroyable performance de Dali Benssalah qui tente à recréer ce sentiment de « retour au bled » vers ses racines.

La nuit tombe, la musique se gorge de percussions et ce jeune homme se laisse aller dans un tourbillon de paix, saisissant la vie dans son instantanéité.

« L’identité devient un mouvement, plus qu’une habitude. »

2018

Basculement des idées et conceptions antiques de l’homme, de la femme, des rangs sociaux, de ce qu’est la virilité, la féminité, le genre…

A la manière dont Taemin sublime la danse dans MOVE à travers un enchainement de mouvements sensuels, virils, bruts et délicats, j’aimerais parvenir à trouver cet équilibre hybride entre singularité et volonté de faire s’effondrer les acquis.

Un nouveau monde qui se transforme par des flux de navigations accélérés, à la conquête d’une identité nationale globale, pluri-culturelle et en mouvement à l’image de notre époque. Une brume de tolérance qui ne fera pousser que du partage dans des espoirs de paix.

Ne plus s’enfermer dans les mœurs, dans des images de virilité ou de féminité qui prennent la poussière, sortir du quartier sans s’y faire avaler par sa culture, être conscient du monde, devenir sans jamais questionner les fondements de nos envies.

Tolérance, choix, conquête de soi à travers des expériences singulières qui sortent des parcours établit et à la fois des catactlysmes trumpesques dignes d’une mauvaise comédie américaine.

L’identité devient un mouvement, plus qu’une habitude.

C’est ça que je trouve magnifique dans l’époque où je vis.

C’est le film qui me semble être la forme la plus populaire pour pouvoir parler à tous de choses sérieuses et ambitieuses qui ne restent pas uniquement figées sur un écran mais qui laissent parfois échapper des lueurs de réflexion à travers la porte, sans volonté d’éduquer mais de questionner ces blocs de ciment qui semblent si bien acquis.

Et si tout ceci s’effondrait.

Le sol bascule, menaçant d’emporter tous mes rêves au fond dans la sueur de l’effort et de la difficulté. En réalité tous ces sacrifices qu’engagent ces projets semblent être un mouvement global dans lequel on ne trébuche pas.

Ces mois de compétition éprouvants ont été l’occasion de regarder un peu en arrière. Pour une fois je me suis assis pour regarder le chemin accompli ces dernières années. Sans avoir à courir après le futur, constater, apprécier.

On en arrive là, à ces insomnies chargées de travail et de dévouement. L’engagement et la passion ont remplacés le peu de cases vides dans le calendrier et cette course à faire des images ne vient en fait que de commencer.

Nils.